Les jardins hydroponiques

à mèche renforcent la sécurité alimentaire des Palestiniens

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A Palestinian woman stands with six of her grandchildren in a garden. She is holding a bunch of onions

Huda Al Takatka passe jusqu’à quatre heures par jour à s’occuper de son jardin hydroponique près de la ville de Beit Fajjar, en Cisjordanie (Palestine). « Je n’ai pas besoin d’autant de temps », avoua-t-elle en affichant son sourire contagieux. « J’aime simplement y passer du temps… avec mes proches ». Il s’agit de son mari, Muhammad, de ses six enfants et de ses onze petits-enfants.

Depuis près d’un an, elle peut cultiver les légumes frais dans ses quatre bacs placés à côté d’un minuscule verger d’agrumes et de figuiers dans sa cour. Comme Muhammad était au chômage en raison d’une déficience visuelle, elle n’avait pas toujours les moyens de se procurer des légumes.

« Maintenant, nous pouvons cultiver ce que nous aimons », affirme-t-elle, « et c’est bien meilleur que ce que nous trouvons au marché ». Elle cultive des radis, des oignons, des choux, des aubergines, des épinards et des tomates.

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A woman in a black and white hijab stands holding a bunch of radishes
Huda Al Takatka, une grand-mère de Beit Fajjar, en Cisjordanie, présente les légumes qu’elle cultive dans ses bacs de culture. Photo MCC/Melita Rempel-Burkholder

Huda est l’une des 20 jardinières et jardiniers du gouvernorat de Bethléem qui a bénéficié du projet de jardin hydroponique de l’Institut de recherche appliquée à Jérusalem (ARIJ), un partenaire de longue date du MCC. Cet institut promeut le développement responsable des terres dans le cadre de l’occupation militaire israélienne de la Cisjordanie. Le programme pilote financé par le MCC ne se contente pas de renforcer la sécurité alimentaire des familles à faibles revenus, il propose également une option durable pour la production alimentaire.

Comme l’explique Munif Doudin, coordinateur agricole de l’ARIJ, les plantes puisent leur humidité dans une couche de cailloux volcaniques imbibés d’eau, recouverts d’une épaisse couche de compost et de tourbe. On verse l’eau dans des tuyaux menant aux pierres situées en dessous au lieu d’arroser par le haut, ce qui réduit l’évaporation. Ce type d’irrigation utilise 60 % d’eau en moins que l’irrigation de surface.

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A man stands in a makeshift green house. He is jesturing to raised beds
Nader Hreimat, directeur des programmes d’agriculture durable à l’Institut de recherche appliquée à Jérusalem (ARIJ), montre les jardins de démonstration sur les toits du bureau de l’ARIJ à Bethléem. MCC photo/Alain Epp Weaver

On initie chaque bénéficiaire sélectionné par ARIJ en consultation avec les dirigeants de la communauté locale à la technique. On lui fournit quatre bacs en plastique d’un mètre carré, ainsi que des tuyaux en PVC et d’autres fournitures. Il reçoit également un cadre qui entoure les bacs d’un filet pour les protéger contre les insectes et filtrer les rayons du soleil en été.

Beit Fajjar est un cadre idéal pour le projet, vu les défis auxquels la ville fait face. Le climat est sec et chaud. L’eau qui peut être recueillie est conservée dans des citernes. Selon l’ARIJ, les habitants de Beit Fajjar ont un accès limité aux sources d’eau publiques, car le gouvernement israélien en a réduit l’accès, comme il l’a fait dans d’autres régions de la Cisjordanie. L’eau est accordée en priorité aux colonies israéliennes en cours de construction plutôt qu’aux communautés palestiniennes existantes.

L’usine de découpe de calcaire de Beit Fajjar, qui constitue l’épine dorsale de l’économie locale, a connu un ralentissement ces dernières années, en partie à cause des restrictions imposées par Israël. Ce ralentissement a poussé Fatima Al Takatka à se porter candidate pour les bacs hydroponiques.

Fatima (qui est parente éloignée de Huda) est veuve et partage sa maison avec sa belle-mère, sa fille adolescente, Afaf, et son fils adulte et principal soutien de famille, Ahmed. Lorsqu’Ahmed a été licencié de son emploi de tailleur de pierre, elle peinait à préparer de bons repas pour la maisonnée.

« Lorsque nous n’avions pas d’argent, nous n’avions pas de légumes », se souvient Fatima.

Elle était ravie d’apprendre qu’elle remplissait les conditions requises pour bénéficier des bacs hydroponiques à mèche. Comme elle vivait dans un quartier densément peuplé de la ville, elle n’avait pas de jardin. Toutefois, elle pouvait installer ses bacs sur le toit plat de sa maison pour y faire pousser des choux-fleurs, des oignons, des radis et des épinards. « Aujourd’hui, lorsque j’ai besoin de cuisiner, je n’ai qu’à monter à l’étage », explique-t-elle.

Fatima espère pouvoir acquérir quelques bacs supplémentaires afin de devenir encore plus autonome. « J’en aurais besoin de dix », déclare-t-elle.

En fait, selon M. Munif, cela devrait être possible. « Tout le monde peut faire du jardinage hydroponique à mèche en utilisant un vieux pot ou une baignoire usagée. À l’exception des galets volcaniques, le compost et les autres matériaux peuvent être trouvés ou adaptés localement.

L’ARIJ espère que la culture hydroponique se répandra localement à mesure que des personnes comme Huda et Fatima construiront leurs jardins et partageront leurs idées avec d’autres. Pour Huda, la nourriture est précieuse, mais la satisfaction qu’elle tire du jardinage l’est tout autant.

Avec un brin d’exagération, elle brandit une poignée de gros radis et déclare : “Ceux-ci, vous savez, valent plus de 1 000 dollars”.

Top image: Huda Al Takatka, left, stands with her grandchildren in front of her screened wicking garden in Beit Fajjar, West Bank. MCC photo/Melita Rempel-Burkholder