Rencontre avec la justice réparatrice

Un partenaire du MCC au Québec ouvre la voie au rétablissement émotionnel et spirituel

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Two women sit at a table in conversation

Daniel* se souvient des paroles d’un aumônier de prison, paroles qui ont transformé sa vision de la vie qui l’attendait : « Il y a peut-être un moyen, cela s’appelle la justice réparatrice ».

Daniel se trouvait en prison pour avoir agressé sexuellement un mineur. Il se souvient que lors de sa comparution au tribunal, il était parfaitement conscient du coût de ses actes et des conséquences pour lui-même. Toutefois, c’est la dette morale envers la survivante de son crime qui lui pesait le plus.

Malheureusement, le système pénitentiaire ne lui a apporté que très peu de soutien. On considérait qu’il présentait un faible risque de récidive, mais cela ne l’a pas libéré du trouble intérieur qu’il éprouvait à cause de ce qu’il avait fait. Grâce aux aumôniers avec lesquels il s’est entretenu pendant son incarcération, il est entré en contact avec le partenaire du MCC, le Centre de services de justice réparatrice (CSJR). C’est là que son parcours vers la justice réparatrice a commencé.

Manon Mazenod est agente de services communautaires au CSJR. Elle explique que la justice réparatrice n’est pas une voie facile et qu’elle ne convient pas à tous. Elle exige une forte dose d’introspection, d’engagement et d’humilité de la part du délinquant, et un appui solide de la part des services de conseil et de thérapie fournis par le CSJR.

« La définition de la justice réparatrice c’est de créer un espace de dialogue entre la victime d’un crime et celui qui l’a perpétré », explique Manon. « La justice réparatrice est distincte du système de justice pénale, tout en lui étant complémentaire. »

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A group of people with their faces obscured, sit facing each other
Un groupe participe à une séance animée par le Centre de services de justice réparatrice (CSJR), partenaire du MCC. Le CSJR travaille avec les auteurs et les survivants de crimes afin de rechercher une justice réparatrice pour toutes les parties. Dans l’intérêt de la confidentialité, on ne dévoile par les noms des personnes. (Photo MCC/Mackenzie Schwarz)

Les « rencontres », comme les appelle le CSJR, sont le point culminant d’un long chemin vers le mieux-être. Ces rencontres regroupent des personnes ayant subi ou commis des crimes similaires (mais surtout pas la victime et l’auteur d’un même crime) et un membre de la communauté. Ceci permet à toutes les parties de tourner la page et d’obtenir la réconciliation qu’elles recherchent.

Dans le cas de Daniel, avant sa rencontre il a passé de nombreux mois en thérapie et ce travail lui a permis d’accueillir ce que la rencontre pouvait lui offrir.

« [Le CSJR] m’a aidé à faire le lien avec “ce Daniel”, celui qui a pris les mauvaises décisions, emprunté les mauvais chemins et fait de quelqu’un une victime », explique-t-il. « Cela m’a permis de le verbaliser, ce qui a été un très grand pas en avant. Ensuite, j’ai pu exprimer toutes les émotions qui y étaient liées. Ainsi, pour la première fois en 47 ans, j’ai pu exprimer mes sentiments et ne pas me contenter d’avoir l’air bien ou de paraître bien aux yeux d’autrui. »

La rencontre de Daniel était avec une survivante d’un crime similaire à celui qu’il avait commis. Après toute la préparation effectuée, il dit avoir l’impression que quelque chose venait de commencer.

« Nous avons parlé et j’ai pu enlever une couche de cuirasse. Cela m’a permis de faire un lien entre le souvenir et tout l’aspect émotionnel… Un nouveau Daniel a commencé à émerger. C’est un Daniel qui, avant, était un professionnel qui gérait les choses, qui s’occupait des gens, qui gérait les émotions. Après cette première rencontre en tête-à-tête, j’étais un Daniel qui ressentait ses émotions, et qui voulait maintenant faire ce qu’il fallait, tenir compte de ce que les autres ressentiraient et comment ils réagiraient », explique-t-il.

Contrairement au système de justice pénale qui fonctionne avec des peines formelles et des définitions juridiques, la justice réparatrice est profondément personnelle et dynamique.

« Lorsqu’il commet un crime, l’auteur de l’infraction a exercé son pouvoir sur la victime », explique Manon. « La justice réparatrice est le processus qui permet de recalibrer et de rééquilibrer ce pouvoir. Ce n’est pas une thérapie, ce n’est pas le pardon, c’est quelque chose de différent ».

*Le nom de famille de Daniel est omis pour des raisons de confidentialité.

Légende de la photo du haut : Manon Mazenod est agente de services communautaires au Centre de Justice Réparatrice (CSJR), partenaire du MCC. Elle travaille avec les auteurs et les survivants de crimes afin de réconcilier et de rechercher une justice réparatrice pour toutes les parties. (Photo MCC/Mackenzie Schwarz)